lhttp://pancake.uchicago.edu/~carroll/notes/ : J. Fric endosse toute responsabilité pour les erreurs que sa traduction (qui n’a pas été vérifiée par l’auteur) aurait pu ajouter. En cas de doute, veuillez vous rapporter à la version originale.

 

6. Champs faibles et ondes gravitationnelles

Définition de la limite champ faible

La métrique approximée par une métrique plate plus une perturbation

Linéariser l’Equation d’Einstein

Recherche de l’équation de propagation de la perturbation

Le tenseur d’Einstein linéarisé

Alternative : dérivation du tenseur d’Einstein linéarisé à partir d’un Lagrangien

Équation d’Einstein linéarisée

Transformation de jauge

La linéarisation considérée comme un difféomorphisme

Difféomorphismes infinitésimaux

Espaces temps équivalents par difféomorphisme

Invariance de jauge et transformation infinitésimale de coordonnées

Quelle jauge fixer ?

Jauge harmonique (de Lorentz)

Équation d’Einstein en jauge harmonique

Trace inverse de la perturbation

Equation d’Einstein exprimée avec la trace inverse.

Métrique autour d’un corps céleste en champ faible

Ondes gravitationnelles

Recherche de l’équation d’onde

Ondes gravitationnelles planes

Caractérisation des paramètres de l’onde gravitationnelle

Fixer la jauge

Deux composantes indépendantes caractérisent l’onde gravitationnelle

La jauge transverse sans trace

Opérateur de projection

Effets physiques des ondes gravitationnelles.

Effet sur des particules de test

Les deux modes de polarisation des ondes gravitationnelles

Quantification des ondes gravitationnelles : le graviton 16

Génération des ondes gravitationnelles

Onde avancée, onde retardée.

Perturbation en un point

Cas d’une source isolée éloignée

Etude  dans le domaine fréquentiel (transformée de Fourier)

Tenseur de Moment quadripolaire

L’onde gravitationnelle est proportionnelle au  moment quadripolaire

Comparaison avec l’onde électromagnétique

Application au cas d’un système binaire d’étoiles

De la difficulté de définir l’énergie émise par le rayonnement gravitationnel

Le tenseur énergie-impulsion est quadratique

Critique de la méthode utilisée précédemment

Solution pratique recommandée : équation d’Einstein au second ordre

Limites de validité de la solution: tmn n’est pas un tenseur au sens de la théorie générale

Une solution acceptable pour l’énergie rayonnée, dans certaines conditions

L’observation confirme la prédiction !, un prix Nobel à la clé.

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6. Champs faibles et ondes gravitationnelles

Définition de la limite champ faible

La première fois que nous avons dérivé l’équation d’Einstein, nous avons vérifié qu’elle convergeait bien avec celle de Newton pour les champs faibles, statiques  et les faibles vitesses des particules de test. Dans ce chapitre nous allons considérer une solution moins restrictive, où le champ reste faible, mais n’est plus statique et où il n’y a pas de restriction sur la vitesse des particules de test. Cela va nous permettre de discuter de phénomènes inconnus ou ambigus de la théorie de Newton, tels que les ondes gravitationnelles (le champ est variable dans le temps) et la déviation de la lumière (qui implique la vitesse la plus  élevée: la vitesse de la lumière).

La métrique approximée par une métrique plate plus une perturbation

Le champ étant faible nous allons pouvons l’exprimer par rapport à la métrique plate de Minkowski  en ajoutant une perturbation supposée très petite.

(6.1)

Pour ne pas se compliquer la vie, nous nous restreindrons au cas ou la métrique hmn prend sa forme canonique, hmn  = diag(- 1, + 1, + 1, + 1). L’hypothèse que hmn est une perturbation nous permet de négliger les termes d’ordre supérieur de cette perturbation.  Il vient immédiatement :

(6.2)

hmn = hmr et hsn hrs. Remarquons que nous pouvons élever ou abaisser les indices en utilisant simplement hmn et hmn, car l’erreur commise est d’un ordre supérieur à un de la perturbation, donc négligeable.

Linéariser l’équation d’Einstein

En fait nous allons considérer une version linéarisée de l’équation de la Relativité générale (où les effets des ordres de  hmn supérieurs au premier ordre de hmn seront négligés.), une théorie où un champ de tenseurs symétriques hmn se propage dans un espace-temps  plat. Cette théorie sera invariante au sens de la Relativité Restreinte, par une transformation de Lorentz xm' = Lm'm  xm, la métrique plate  hmn est invariante tandis que la perturbation se transforme selon :

(6.3)

(Remarquons que nous aurions pu considérer des perturbations, dans un espace-temps autre que celui de Minkowski. Dans ce cas la métrique aurait été gmn = gmn (0) + hmn, et nous aurions dérivé une théorie de propagation d’un tenseur symétrique dans un espace courbe de métrique gmn (0). Une telle approche s’avère nécessaire en Cosmologie par exemple)

Recherche de l’équation de propagation de la perturbation

Nous cherchons une équation du mouvement pour la perturbation hmn, résultant de l’application de l’équation d’Einstein réduite au premier ordre. Commençons par les symboles de Christoffel, ils sont donnés par :

(6.4)

Comme les coefficients de connexions sont des fonctions des dérivées, supposées également petites, des perturbations du premier ordre, leur seule contribution au tenseur de Riemann viendra de leurs dérivées, les carrés des connexions pouvant être négligées. En abaissant un index par commodité nous obtenons :

(6.5)

Le tenseur de Ricci s’obtient par contraction sur m et r,  il donne :

(6.6)

Il est manifestement symétrique en  m et . Dans cette expression nous avons défini la trace de la perturbation  h = hmn hmn = hmm, et le d’alembertien est simplement celui d’un espace plat, = - ²t+ ²x+ ²y+ ²z. Contractons encore pour obtenir le scalaire de Ricci :

(6.7)

Le tenseur d’Einstein linéarisé

Combinons ces valeurs, pour obtenir le tenseur d’Einstein :

(6.8)

Ceci est cohérent avec notre interprétation d’une théorie linéarisée décrivant un tenseur symétrique dans un espace-temps plat.

Alternative: Dérivation du tenseur d’Einstein linéarisé à partir d’un Lagrangien

Le tenseur d’Einstein linéarisé (6.8) peut être aussi dérivé de la variation du Lagrangien suivant respectivement à hmn.

(6.9)

Nous n’entrerons pas dans les détails du calcul, très classique.

Équation d’Einstein linéarisée

L’équation du champ linéarisée est évidemment Gmn = 8GTmn, où  Gmn est donné par (6.8) et  Tmn est le tenseur énergie-impulsion, évalué à l’ordre zéro pour hmn. Nous n’incluons pas d’ordre plus élevé pour le tenseur énergie-impulsion, parce que sa valeur est réputée faible pour que la limite de champ faible s’applique. Autrement dit l’ordre le plus bas non nul de Tmn est mécaniquement du même ordre de grandeur que la perturbation. Remarquons que la loi de conservation à l’ordre le plus bas est simplement  mTmn = 0. Nous serons confrontés le plus souvent aux équations du vide, qui sont simplement Rmn = 0, où Rmn est donné par (6.6).

Ces équations linéarisées vont nous permettre de trouver une solution.

Transformation de jauge

Mais d’abord il nous faut régler le problème de l’invariance de jauge. Ce problème se pose car la condition gmn = hmn+ hmn ne spécifie pas complètement le système de coordonnées dans l’espace-temps, il peut y avoir un autre système de coordonnées où la métrique peut toujours être écrite sous forme de la métrique de Minkowski plus une perturbation, perturbation qui pourra être différente. Donc la décomposition de la métrique, en une métrique de base perturbée n’est pas unique.

La linéarisation considérée comme un difféomorphisme

Élevons le débat, notre interprétation d’une théorie linéarisée gouvernant le comportement de champs de tenseurs  sur une “toile de fond plate” peut se formaliser en termes " d’espace-temps de fond (background spacetime)" Mb,, “d’espace-temps  physique” Mp, et de difféomorphisme F: Mb Mp.

Les variétés Mb et Mp sont deux représentations de la “même” (puisqu’elles sont difféomorphes), mais nous supposons qu’elles possèdent des champs de tenseurs différents. Sur Mb nous avons défini une métrique plate  de Minkowski hmn, tandis que sur   Mp nous avons une métrique gb qui est solution de l’équation d’Einstein. (Pour la bonne forme, nous supposons également Mb muni des coordonnées xm et Mp muni des coordonnées y, même si cela n’est pas le plus important). Le difféomorphisme F nous permet de déplacer les tenseurs entre l’espace-temps de fond et l’espace-temps physique, dans un sens ou dans l’autre. Comme nous voulons que notre théorie linéarisée soit construite sur cet espace de fond, nous sommes intéressés par la rétroprojection (F*g)mn de la métrique physique. Nous pouvons définir la perturbation comme la différence entre la valeur rétro projetée de la métrique physique et la métrique plate de Minkowski :

(6.10)

Cette définition n’implique pas que les composantes de hmn soit petites,  cependant si les champs gravitationnels sur Mp sont faibles, alors pour certains difféomorphismes F, nous aurons | hmn| < < 1. Nous nous limiterons aux difféomorphismes remplissant cette condition. Alors le fait que gb soit solution des équations d’Einstein sur l’espace-temps physique signifie que hmn sera solution des équations linéarisées sur l’espace-temps de fond, car F, en tant que difféomorphisme, peut être utilisé pour rétroprojeter les équations d’Einstein elles-mêmes.



Exprimé ainsi, le problème d’invariance de jauge est simplement le fait qu’il y a un grand nombre de difféomorphismes entre Mb et Mp qui répondent aux critères d’éligibilité (perturbation faible). Considérons un champ de vecteurs xm (x) sur l’espace-temps de fond. Ce champ de vecteurs génère une famille de difféomorphismes mono paramétrée Ye : Mb Mb.

Difféomorphismes infinitésimaux

Pour suffisamment petit, si F est un difféomorphisme pour lequel la perturbation définie par (6.10) est également petite, alors celle résultant de (FoYe) sera également petite, même si la valeur est différente.





Particulièrement, nous pouvons définir une famille de perturbations paramétrée par  :

(6.11)

La seconde égalité repose sur le fait que la rétroprojection pour la composition est le produit des rétroprojections dans l’ordre inverse, ceci résultant du fait qu’une rétroprojection elle-même déplace les choses dans le sens opposé à celui de l’application originale. En reportant dans la relation (6.10), nous obtenons :

(6.12)

(car la rétroprojection de la somme de deux tenseurs est la somme des rétro projections). Si est petit alors Ye* (hmn) va être égal à hmn au premier ordre, tandis que les deux autres termes nous donnent une dérivée de Lie :

(6.13)

La dernière égalité résulte de notre calcul précédent de la dérivée de Lie de la métrique (5.33), et du fait que les dérivées covariantes sont simplement les dérivées partielles au premier ordre.

Les difféomorphismes infinitésimaux Fe produisent une représentation différente de la même situation physique, tout en maintenant la contrainte de faiblesse de la perturbation.

Espaces temps équivalents par difféomorphisme

Donc, le résultat (6.12) nous indique quelles perturbations de la métrique caractérisent des espaces temps équivalents, ce sont ceux qui sont en relation réciproque par la fonction 2(mxn), pour un vecteur xm . L’invariance de notre théorie sous de telles transformations est analogue l’invariance de jauge traditionnelle en électromagnétisme par la transformation Am Am + m. (L’analogie est différente de celle que nous avons déjà mentionné avec l’électromagnétisme, concernant les transformations locales de Lorentz exprimées dans le formalisme orthonormé pour le changement de base dans un fibré interne de vecteurs). En électromagnétisme, l’invariance vient de ce que l’intensité du champ Fmn = mAn -nAm est conservé par les transformations de jauge, de même nous trouvons que la transformation (6.13) modifie le tenseur de Riemann linéarisé selon :

(6.14)

Notre détermination abstraite de la transformation de jauge appropriée pour la perturbation de la métrique se trouve vérifiée par le fait qu’elle conserve la courbure (et en conséquence l’espace-temps physique.

Invariance de jauge et transformation infinitésimale de coordonnées

De façon moins formelle, l’invariance de jauge peut aussi être considérée comme l’invariance vis-à-vis d’une transformation infinitésimale de coordonnées. Notre difféomorphisme Ye peut être interprété comme un changement de coordonnées de xm à xm - xm (le signe moins qui n’est pas conventionnel vient du fait que la “nouvelle” métrique est rétro projetée d’une faible distance en avant sur les courbes intégrales, ce qui revient à remplacer ses coordonnées par celles en vigueur à cette faible distance, mais en arrière sur ces courbes).

Si nous continuons en appliquant les règles de transformation habituelles pour un changement de coordonnées, on trouve (6.13) même si on triche un peu en égalant les composantes de tenseurs dans deux systèmes de coordonnées. Voir  Schutz ou Weinberg pour un exemple.

Quelle jauge fixer ?

Quand nous sommes face à un système qui est invariant par une sorte de transformation de jauge, notre premier réflexe est de fixer une jauge.

Jauge harmonique (de Lorentz)

Nous avons déjà présenté la jauge harmonique que nous allons retrouver dans le contexte de la limite champ faible. Rappelons que cette jauge était spécifiée par xm = 0, ce qui, comme nous l’avions montré est équivalent à :

(6.15)



Dans la limite champ faible ceci devient :

(6.16)

Soit :

(6.17)

Cette condition est aussi appelée la jauge de Lorentz (ou jauge d’Einstein ou jauge de Hilbert ou jauge  de De Donder ou jauge de Fock). Comme précédemment il nous reste quelques libertés de jauge, car nous pouvons changer nos coordonnées par des fonctions harmoniques (infinitésimales).

Équation d’Einstein en jauge harmonique



Dans cette jauge les équations linéarisées d’ Einstein Gmn = 8GTmn se simplifient en :

(6.18)

Tandis que les équations du vide Rmn = 0 prennent la forme élégante :

(6.19)



Qui est simplement l’équation d’onde relativiste conventionnelle. Ensemble (6.19) et (6.17) déterminent l’évolution d’une perturbation du champ gravitationnel dans le vide dans la jauge harmonique.

Trace inverse de la perturbation



Il est souvent commode de travailler avec une description légèrement différente de la perturbation de la métrique. Nous définissons la “trace inverse” de la perturbation `hmn par :



(6.20)

Le nom vient de ce que `hmµ = - hmm. (Le tenseur d’ Einstein est simplement la trace inverse du tenseur de Ricci).  En termes de `hmn la condition de jauge harmonique devient :



(6.21)



Équation d’Einstein exprimée avec la trace inverse

Les équations du champ complet deviennent :

(6.22)

Dont il découle immédiatement que les équations du vide sont :

(6.23)

De (6.22) et de notre étude précédente de la limite newtonienne, il est facile de dériver la métrique de champ faible pour une source stationnaire sphérique comme une planète ou une étoile. Rappelons que nous avons déjà montré que l’équation d’Einstein prédisait que h00 satisfaisait à l’équation de Poisson (4.51) dans la limite du champ faible et impliquait :

(6.24)

est le potentiel Newtonien classique, = - GM/r. Supposons que le tenseur énergie-impulsion de notre source est dominé par l’énergie au repos r= T00. (Une telle supposition n’est pas nécessaire dans la limite du champ faible, mais est réaliste dans le cas de planètes ou d’étoiles que nous considérons). Les autres composantes de  Tmn vont donc être négligeables vis-à-vis de T00, et de (6.22) la même condition vaut pour `hmn. Si `h00 est très grand vis-à-vis de `hij, nous aurons :

(6.25)

Et de (6.20) nous obtenons :

(6.26)

Les autres composantes de `hmn sont négligeables, nous en déduisons :

(6.27)

et :

(6.28)

Métrique autour d’un corps céleste en champ faible

La métrique pour une étoile ou une planète dans la limite du champ faible est alors :

(6.29)

Ondes gravitationnelles

Les ondes gravitationnelles représentent une application pas vraiment très simple de la limite champ faible. Ceux qui connaissent l’électromagnétisme remarqueront la similitude des situations et de la procédure à suivre. Nous commençons par les équations linéarisées dans le vide (6.23).

Recherche de l’équation d’onde

Comme le d’alembertien en espace plat a la forme = - ²t+ Ѳ, l’équation du champ est sous la forme d’une équation d’onde pour `hmn. Comme tous les physiciens dignes de ce nom le savent, dans ce cas on passe sa journée à rechercher les solutions sous forme complexe et à la nuit, on en retient la partie réelle.

Ondes gravitationnelles planes

Nous savons qu’un ensemble de solutions particulièrement utiles est constitué par les ondes planes, données par :

(6.30)

Cmn est un tenseur constant, symétrique de type (0, 2),  et ks est un vecteur constant appelé le vecteur d’onde. Pour vérifier que c’est bien une solution nous le reportons dans :

(6.31)

Comme (pour une solution intéressante) les composantes de  hmn ne sont pas toutes nulles partout, nous devons avoir :

(6.32)



L’onde plane (6.30) est donc une solution des équations linéarisées si le vecteur d’onde est nul, ce qui traduit en clair signifie qu’il se propage à la vitesse de la lumière. La composante temporelle du vecteur d’onde est souvent appelée la fréquence de l’onde et nous l’écrivons ks = (, k1, k2, k3). (Plus généralement, un observateur qui se meut à une quadri-vitesse Um observera que l’onde a une fréquence = - kmUm.) Alors la condition de nullité du vecteur d’onde devient :

(6.33)



Bien sûr, notre onde n’est pas la solution la plus générale, toute combinaison linéaire (même infinie) d’ondes planes indépendantes peut être solution de l’équation (6.23). En fait toute solution peut être écrite comme une telle superposition.

Caractérisation des paramètres de l’onde gravitationnelle

Nous devons spécifier, pour caractériser l’onde, les dix paramètres libres de Cmn et les trois paramètres du vecteur nul ks.

Fixer la jauge

La plupart de ces possibilités proviennent de la liberté de coordonnées et de la liberté de jauge, que nous allons fixer. Commençons par imposer la condition de jauge harmonique (6.21). Elle implique :

(6.34)

Ce qui n’est vrai que si :

(6.35)

Ce qui nous dit que le vecteur d’onde est orthogonal à Cmn. Cela fait quatre équations, réduisant le nombre de composantes indépendantes de Cmn de dix à six.

Bien que nous ayons imposé une jauge harmonique, il reste des degrés de liberté pour les coordonnées. Rappelons que toute transformation de coordonnées de la forme :

(6.36)

va conserver la condition harmonique sur les coordonnées :

(6.37)

Aussi longtemps que nous avons :

(6.38)

Comme (6.38) est elle-même une équation d’onde pour  zm,  quand nous aurons choisi une condition, nous aurons utilisé toute nos degrés de libertés de jauge. Choisissons la condition suivante :

(6.39)

k est le vecteur d’onde pour notre onde gravitationnelle et les Bm sont des coefficients constants.

Revendiquons maintenant que cette liberté résiduelle nous permet de convertir les coefficients quelconques de C(old)mn qui caractérisent notre onde gravitationnelle en un nouveau jeu C(new)mn, tel que :

(6.40)

et

(6.41)

À vrai dire la dernière condition est à la fois un choix de jauge et un choix de référentiel de Lorentz. Le choix d’ensembles de jauge impose  UmC(new)mn = 0, pour un vecteur de type temps Um, tandis que le choix de référentiel fait pointer Um vers l’axe des temps.  Regardons si c’est possible en résolvant explicitement pour les coefficients nécessaires Bm. Par la transformation (6.36), La modification résultante de la perturbation de la métrique peut s’écrire :

(6.42)

Ce qui induit une modification de la trace inverse de la perturbation.

(6.43)

Utilisant les formes spécifiques (6.30) pour la solution et (6.39) pour la transformation, nous obtenons :

(6.44)

Imposer (6.40) va signifier :

(6.45)

(6.46)

Nous pouvons imposer (6.41), d’abord pour  = 0 :

(6.47)

(6.48)

Imposons alors (6.41) pour = j :

(6.49)

(6.50)

Pour vérifier que tous ces choix sont mutuellement cohérents, nous pouvons reporter (6.48) et (6.50) dans (6.40), ce que je vous laisse le soin de faire. Supposons que nous avons réalisé cette transformation, et référons-nous aux nouvelles composantes Cmn (new) simplement comme Cmn.

Deux composantes indépendantes caractérisent l’onde gravitationnelle

Nous partons avec dix nombres indépendants dans la matrice symétrique Cmn. Choisir la jauge harmonique impose les quatre conditions (6.35), ce qui réduit le nombre de composantes indépendantes à six. Utiliser notre liberté de jauge restante conduit à la condition (6.40) et aux quatre conditions (6.41),  mais comme = 0 (6.41) implique (6.35), donc nous n’avons qu’un total de quatre contraintes complémentaires, ce qui nous laisse deux composantes indépendantes. Nous avons utilisé tous nos degrés de liberté possibles, donc ces deux nombres représentent l’information caractérisant notre onde plane dans cette jauge. Ceci peut être plus explicite, en choisissant nos coordonnées spatiales telles que l’onde se propage dans la direction  x3; comme suit :

(6.51)

Où nous savons que  k3 = car le vecteur d’onde est nul. Dans ce cas, kmCmn = 0 et C0n = 0, ensembles impliquent :

(6.52)

Les seules composantes non nulles de Cmn sont donc C11, C12, C21, et C22. Mais  Cmn est sans trace et symétrique, donc généralement nous pouvons écrire :

(6.53)

Alors pour une onde plane, dans cette jauge, voyageant dans la direction x3 les deux composantes C11 et C12 (avec la fréquence ) caractérisent complètement l’onde.

La jauge transverse sans trace

En utilisant toute notre liberté de jauge, nous avons rencontré une sous jauge de la jauge harmonique appelée la jauge transverse sans trace (ou quelquefois la “jauge de rayonnement”). Le nom vient de ce que la perturbation métrique est sans trace et perpendiculaire au vecteur d’onde. Nous avons utilisé la perturbation de trace inverse `hmn. plutôt que la perturbation elle-même hmn  mais comme `hmn est sans trace (car  Cmn l’est), et est égal à la trace inverse de hmn, dans cette jauge nous avons :



(6.54)

Donc nous pouvons omettre la barre sur hmn  , tant que nous sommes dans cette jauge. Une caractéristique appréciée de la jauge transverse sans trace, est que étant donné les composantes d’une onde plane dans une jauge quelconque, nous pouvons les convertir simplement dans la jauge transverse sans trace.

Opérateur de projection

Nous commençons par définir un tenseur Pmn qui joue le rôle d’un opérateur de projection :

(6.55)

Vous pouvez vérifier que qu’il projette les vecteurs sur des hyperplans orthogonaux au vecteur unitaire nm.. Nous prenons nm de façon à ce qu’il soit un vecteur unitaire de type espace, orienté dans la direction de propagation de l’onde :

(6.56)

Alors la partie transverse d’une perturbation  hmn est simplement la projection PmrPnshrs, et la partie transverse sans trace est obtenue en la retranchant de la trace :

(6.57)

Pour plus d’information sur le cas général, se référer aux ouvrages de Misner, Thorne et Wheeler.

Effets physiques des ondes gravitationnelles

Pour se représenter les effets physiques des ondes gravitationnelles, il est utile de considérer le mouvement de particules de test soumises à une onde. Ce n’est pas suffisant pour calculer la trajectoire d’une particule unique, car cela ne nous indique que la valeur des coordonnées le long de la ligne d’univers. En fait pour toute particule unique, nous pouvons trouver des coordonnées transverses sans trace dans lesquelles, la particule paraît stationnaire au premier ordre de hmn.) Pour obtenir une mesure indépendante des coordonnées de l’effet de l’onde, nous considérons le mouvement relatif de particules voisines, décrites par l’équation de déviation géodésique. Si nous considérons des particules voisines dont la quadri-vitesse est définie par un champ unique de vecteurs Um (x) et le champ quadrivecteur de séparation par Sm, nous avons :

(6.58)

Calculons le membre de gauche au premier ordre en hmn. Si les particules de test se déplacent lentement, nous pouvons exprimer la quadri-vitesse par un vecteur dans la direction du temps entaché d’une correction d’ordre hmn et supérieur, mais comme nous savons que le tenseur de Riemann est également au premier ordre les corrections de Un peuvent être ignorées et nous pouvons écrire :

(6.59)

Donc nous n’avons à calculer que Rm00s, ou de façon équivalente Rm00s. De (6.5) nous tirons :

(6.60)

Mais hm 0 = 0, alors :

(6.61)

Comme les particules se déplacent lentement nous avons = x0 = t au premier ordre, alors l’équation de déviation géodésique devient :

(6.62)

Pour notre onde se déplaçant dans la direction x3 ceci implique que seulement S1 et S2 sont affectés.

Effet sur des particules de test

Les particules de test ne sont perturbées que dans les directions perpendiculaires au vecteur d’onde. Ceci est à rapprocher de l’électromagnétisme où les champs magnétiques et électriques d’une onde plane sont perpendiculaires au vecteur d’onde. Notre onde est caractérisée par deux nombres que par commodité pour le futur, nous baptiserons C+ = C11 et C × = C12. Considérons séparément leurs effets, commençons par C × = 0 et C+ ¹ 0. Nous avons :

(6.63)

et

(6.64)

ce qui peut être résolu immédiatement pour donner au premier ordre.

(6.65)

et

(6.66)

Alors les particules initialement séparées dans la direction x1 vont osciller d’avant en arrière dans la direction  x1, et de même mais dans la direction x² pour celles séparée initialement dans la direction x2. Si nous avons à l’origine un anneau circulaire stationnaire de particules de test dans le plan x-y, il va s’aplatir et s’élargir périodiquement  au passage de l’onde plane, formant une enveloppe ressemblant à un "+" :



D’autre part, le cas C+ = 0 et C × ¹ 0 va produire de façon similaire la solution :

(6.67)

et

(6.68)

Dans ce cas la déformation qui se produira périodiquement au passage de l’onde sera enveloppée dans une forme ressemblant à un "×" :



Les deux modes de polarisation des ondes gravitationnelles

On comprend mieux la raison de la notation C+ et C ×. Ces deux paramètres mesurent deux modes de polarisation linéaires indépendants de l’onde gravitationnelle. Si nous voulons nous pouvons définir la polarisation circulaire droite CR et gauche CL comme suit :

(6.69)

L’effet d’une onde CR pure va être de faire tourner la figure formée par les particules vers la droite, 

Et similairement vers la gauche pour le mode CL. (Notons que les particules ne se déplacent pas sur l’anneau, elles décrivent simplement de petits épicycles.

Quantification des ondes gravitationnelles : le graviton

Nous pouvons aussi décrire les états de polarisation d’ondes gravitationnelles classiques par les propriétés des particules que nous pouvons escompter par une quantification (théorie quantique).  Le champ électromagnétique a deux états indépendants de polarisation qui sont décrits par des vecteurs dans le plan x-y, chaque polarisation étant invariante par une rotation de 360° dans ce plan. Le photon, particule sans masse et de spin 1 est le quantum de ce champ. D’autre part le neutrino, particule également sans masse (?) est décrit par un champ qui change de signe sous une rotation de 360°, il est invariant par une rotation de 720° et il a un spin de 1/2. La règle générale est que le spin  S est lié à l’angle de rotation minimum pour lequel la polarisation est invariante par la relation S = 360°/. Le champ gravitationnel dont l’onde se propage à la vitesse de la lumière doit être quantifié par une particule sans masse. Les modes de polarisation que nous avons décrits étant invariants par des rotations de 180° dans le plan x-y, le spin de la particule associée “le graviton” doit donc être de 2. Ce n’est pas demain la veille qu’on découvrira d’une telle particule (et il est bien possible qu’on ne la découvre jamais directement), mais toute théorie rationnelle de gravitation quantique doit prédire son existence.

Génération des ondes gravitationnelles

Maintenant que nous avons établi les solutions des équations linéaires des ondes planes dans le vide, il nous reste à nous attaquer au problème de la génération des ondes gravitationnelles par des sources. À cet effet, nous devons considérer les équations qui prennent en compte le couplage avec la matière.

(6.70)

Cette équation peut être résolue, par analogie à l’électromagnétisme en utilisant une fonction de Green. Décrivons les grandes lignes de la méthode.

La fonction de Green G(xs - ys) pour l’opérateur d’alembertien est la solution de l’équation d’onde en fonction d’une source de type fonction delta.

(6.71)

 Où □x représente le d’alembertien correspondant aux coordonnées xs. L’intérêt d’une telle fonction réside dans le fait que la solution générale d’une équation telle que (6.70) peut être écrite :

(6.72)

Comme il est facile de la vérifier. (Remarquons qu’un facteur tel que (-g)1/2 n’est pas nécessaire du fait que nous sommes dans un espace plat).

Onde avancée, onde retardée

Les solutions à (6.71) sont bien connues et sont interprétées comme retardées ou avancées selon qu’elles représentent des ondes voyageant dans le sens ou dans le sens contraire du temps. C’est la fonction de Green “retardée” qui nous intéresse qui représente les effets cumulés  du passé du signal  au point considéré. Elle vaut :

(6.73)

Ici nous avons utilisé les barres pour noter les vecteurs spatiaux = (x1, x2, x3) et y = (y1, y2, y3), de norme | - y| = [dij (xi - yi)(xj - yj)]1/2. La fonction (x0 - y0) vaut 1 quand x0 > y0, et zéro autrement. La justification de (6.73) nous entraînerait trop loin de l’objet de ce cours, mais peut être trouvé dans de nombreux ouvrages de l’électrodynamique ou  d’équations différentielles partielles en physique.

En reportant (6.73) dans (6.72), nous pouvons utiliser la fonction delta pour calculer l’intégrale sur y0, il nous reste :

(6.74)

Où  t = x0. le terme " temps retardé" est utilisé pour désigner l’expression :

(6.75)

Perturbation en un point

L’interprétation de (6.74) est claire: la perturbation du champ gravitationnel à (t,) est la somme des influences des sources d’énergie-impulsion situées au point (tr, - y) sur le cône de lumière du passé. 

Cas d’une source isolée éloignée

Intéressons-nous à cette solution générale et considérons le cas d’onde gravitationnelle émise par une source isolée, plutôt éloignée constituée de matière non relativiste. Nous préciserons ces approximations au cours de notre exposé.

Étude  dans le domaine fréquentiel (transformée de Fourier)

D’abord commençons par fixer quelques conventions  sur les transformées de Fourier, ce qui facilite la vie lorsqu’on travaille sur des phénomènes périodiques. Prenons la transformée (directe et inverse) de Fourier respectivement au temps d’une fonction F (t,),

(6.76)

Prenons la transformée de la perturbation de la métrique, nous obtenons :

(6.77)

La première équation est simplement la définition de la transformée de Fourier, la deuxième vient de la solution de (6.74), la troisième introduit un changement de variable t en tr, et la quatrième est de nouveau la définition de la transformée de Fourier. Faisons maintenant l’hypothèse que la source est isolée, lointaine, et animée d’une faible vitesse. Cela nous permet de considérer la source centrée à une distance (spatiale) R, et ses différentes parties situées à des distances R + R telles que R < < R. Comme son mouvement est lent, la majorité du rayonnement émis le sera à des fréquences suffisamment basses pour que R < < w-1. (La lumière traverse la source beaucoup plus rapidement que les composants de la source elle- même).

Compte tenu de ces approximations, le terme eiw| - y|/| - y| peut être remplacé par eiwR/R et sorti de l’intégrale. Il nous reste :

(6.78)

En fait il n’est pas nécessaire de calculer toutes les composantes de ~`hmn (,) transformée de Fourier de `hmn (,), car la condition de jauge harmonique m(t,) = 0 implique dans l’espace de Fourier :

(6.79)

Nous n’avons donc qu’à nous intéresser aux composantes de type espace de ~`hmn (,). L’équation (6.78) nous incite à calculer l’intégrale de composantes spatiales de ~Tmn (,y). Commençons par intégrer par parties à l’envers :

(6.80)

Le premier terme est une intégrale de surface qui s’annule, car la source est isolée, le second peut être mis en relation avec  ~T0J  par la version espace de Fourier de mTmn = 0 :

(6.81)

Alors,

(6.82)



La seconde ligne est justifiée par le fait que le membre de gauche est symétrique en i et j, tandis que la troisième et quatrième ligne sont de simples répétitions de l’intégration par parties inverse et reflètent la conservation de Tmn.



Tenseur de Moment quadripolaire

Il est conventionnel de définir le tenseur de moment quadripolaire de la densité d’énergie de la source :

(6.83)

Un tenseur constant sur chaque surface à temps constant. Exprimé en termes de transformation de Fourier du moment quadripolaire, notre solution prend la forme compacte :

(6.84)

où, en retransformant vers  t,

(6.85)

Où comme avant  tr = t - R.

L’onde gravitationnelle est proportionnelle au  moment quadripolaire.

L’onde gravitationnelle produite par un objet non relativiste isolé est donc proportionnelle à la dérivée seconde du moment quadripolaire de la densité d’énergie au point où le cône lumière du passé de l’observateur coupe la source.

Comparaison avec l’onde électromagnétique

Ceci est différent de l’électromagnétisme  où la contribution principale au rayonnement électromagnétique provient du changement du moment dipolaire de la densité de charge. Cette différence peut s’expliquer par la nature universelle de la gravitation. Un changement de moment dipolaire correspond à un déplacement du centre de densité, densité de charge en électromagnétisme, densité d’énergie en gravitation. Alors que rien ne s’oppose à l’oscillation du centre de charge d’un objet, l’oscillation du centre de gravité d’un système isolé viole la conservation du moment d’inertie (si nous secouons un objet, nous et la terre nous déplaçons en sens contraire pour compenser). Le moment quadripolaire qui mesure la forme du système est généralement plus petit que le moment dipolaire et pour cela (et aussi parce que la gravité se couple très faiblement avec la matière), le rayonnement gravitationnel est typiquement beaucoup plus faible que le rayonnement électromagnétique.

Application au cas d’un système binaire d’étoiles

Il est toujours instructif d’appliquer une solution générale à un cas particulier. Un cas réellement intéressant est celui du rayonnement gravitationnel émis par un système binaire d’étoiles. Pour simplifier, considérons deux étoiles de masse M en orbite circulaire dans le plan x1-x2, à une distance r du centre de gravité.

Nous traiterons l’aspect dynamique de façon classique (approximation Newtonienne). En particulier sur une orbite circulaire la force de gravité équilibre la force d’inertie “centrifuge” :

(6.86)

Ce qui nous donne :

(6.87)

Le temps pour accomplir une révolution complète est :

(6.88)

Soit une pulsation de :

(6.89)

En termes de , nous pouvons décrire la trajectoire de l’étoile a,

(6.90)

et de l’étoile b,

(6.91)

La densité d’énergie correspondante est :

(6.92)

La profusion de fonctions delta nous permet d’intégrer l’expression directement pour obtenir le moment quadripolaire par (6.83) :

(6.93)

Et de cela tirer il est facile d’obtenir les composantes de la perturbation métrique par (6.85) :

(6.94)

Les autres composantes de  `hmn s’obtiennent en appliquant la condition de jauge harmonique (nous n’avons pas imposé de condition subsidiaire de jauge, donc nous sommes libres de le faire.)

De la difficulté de définir l’énergie émise par le rayonnement gravitationnel

Il paraît naturel à ce stade de parler de l’énergie de rayonnement gravitationnel émise. Cette discussion se heurte immédiatement à des problèmes techniques et philosophiques. Comme nous l’avons relaté précédemment, il n’y a pas vraiment de mesure locale objective de l’énergie liée à un champ gravitationnel. Il est vrai que dans l’approximation champ faible nous avons décrit la gravitation par un tenseur symétrique se propageant dans un espace-temps à métrique fixe. Nous pouvons espérer dériver un tenseur impulsion énergie pour les fluctuations de hmn, comme c’était le cas pour l’électromagnétisme et les autres théories de champs. Jusqu’à un certain point c’est possible, mais ce n’est pas sans problèmes. Compte tenu de ces difficultés, on trouve différentes propositions dans la littérature sur ce que devrait être le tenseur énergie-impulsion dans la limite champ faible. Toutes ces propositions sont différentes, mais la plupart conduisent aux mêmes solutions pour des problèmes clairement identifiés comme la valeur  du taux d’énergie rayonnée par un système d’étoiles binaire.

Du point de vue technique, les difficultés apparaissent quand nous considérons la forme que le tenseur énergie-impulsion doit prendre.

Les tenseurs énergie-impulsion sont quadratiques

Nous avons considéré précédemment les tenseurs énergie-impulsion pour l’électromagnétisme et la théorie des champs scalaires qui possédaient tous deux la propriété importante d’être quadratique dans leurs champs respectifs. Par hypothèse dans notre approche de la limite champ faible nous n’avons considéré que les termes linéaires de la perturbation métrique. En conséquence pour caractériser l’énergie transportée par les ondes gravitationnelles nous devons étendre nos calculs au moins au second ordre de hmn.

Critique de la méthode utilisée précédemment

En fait nous avons un peu triché tout le temps. Dans l’étude de l’effet des ondes gravitationnelles sur des particules de test et dans la génération des ondes par un système binaire, nous avons utilisé le fait que les particules se déplacent sur des géodésiques. Comme nous le savons ceci est déduit de la conservation covariante de l’énergie-impulsion ÑmTmn = 0. A l’ordre où nous avons travaillé, en fait nous avons mTmn = 0, ce qui implique que les particules de test se déplacent en ligne droite dans l’espace de fond plat. Ceci est un signe flagrant de l’incohérence de la limite champ faible.

Solution pratique recommandée : Equation d’Einstein au second ordre

En pratique, le mieux que nous puissions faire est de résoudre les équations champ faible jusqu’à un ordre approprié et justifier après coup la validité de la solution. En gardant ces considérations à l’esprit, traitons les équations d’Einstein (dans le vide) au deuxième ordre, et regardons comment le résultat peut être interprété en termes de tenseur énergie-impulsion pour le champ gravitationnel. Si nous écrivons la métrique sous la forme

gmn = hmn+ hmn, au premier ordre nous avons :

(6.95)

G(1)mn est le tenseur d’ Einstein développé au premier ordre en  hmn. Ces équations déterminent  hmn dans la limite des (inévitables) transformations de jauge, donc pour satisfaire les équations au second ordre nous devons ajouter une perturbation d’ordre supérieur et écrire :

(6.96)

La version des équations d’Einstein au second ordre inclut en plus tous les termes qui sont, soit quadratiques en hmn, soit linéaires en h(2)mn. Comme les termes croisés sont au moins du troisième ordre nous avons :

(6.97)

ici, G(2)mn est la partie du tenseur d’Einstein qui est du second ordre de la perturbation métrique. Il peut être calculé à partir du tenseur de Ricci au second ordre, ce qui donne :

(6.98)

Nous pouvons réécrire  (6.97) sous la forme suggestive :

(6.99)

En définissant simplement :

(6.100)

La notation est adaptée pour suggérer que tmn est un tenseur énergie-impulsion, spécifique à ce champ (au moins dans l’hypothèse champ faible). Revendiquer cela paraît plausible, remarquons que l’identité de  Bianchi G(1)mn [h+ h(2)] implique que  tmn est conservé dans le contexte d’espace-temps plat,

(6.101)

Limites de validité de la solution: tmn n’est pas un tenseur au sens de la théorie générale

Malheureusement, il y a des limitations à notre interprétation de tmn comme tenseur énergie-impulsion. D’abord ce n’est pas un tenseur au sens de la théorie générale, mais nous avons laissé cela de côté par hypothèse. Plus grave, il n’est pas invariant par des transformations de jauge (difféomorphismes infinitésimaux), comme vous pouvez le vérifier par calcul direct. Pourtant nous pouvons construire des grandeurs qui sont invariantes sous certaines transformations de jauge (typiquement celles qui s’annulent rapidement à l’infini, voir Wald). Elles incluent l’énergie totale sur une surface à temps constant,



(6.102)

et l’énergie totale rayonnée par cette surface vers l’infini :

(6.103)

Ici, l’intégrale est prise sur une surface S de type temps, constituée d’une sphère spatiale à l’infini et d’un intervalle de temps, et nm est un vecteur unitaire de type espace normal à S.

Une solution acceptable pour l’énergie rayonnée, dans certaines conditions

L’évaluation de ces formules en termes de moment quadripolaire rayonné par une source représente un calcul long que nous ne reproduirons pas. Le résultat en termes d’énergie rayonnée s’écrit :

(6.104)

où la puissance  P est donnée par :

(6.105)

Et ici  Qij est la partie sans trace du moment quadripolaire :

(6.106)

Pour le système binaire représenté par (6.93), la partie quadripolaire sans trace est :

(6.107)

et sa dérivée troisième est donc :

(6.108)

La puissance rayonnée par le système binaire est alors :

(6.109)

Soit en utilisant l’expression (6.89) pour la fréquence,

(6.110)

L’observation confirme la prédiction, un prix Nobel à la clé

Et ceci a été vraiment observé. En 1974 Hulse et Taylor découvrirent un système binaire, PSR1913+16, dont les deux étoiles étaient très petites (les effets classiques négligeables ou au moins contrôlés) dont une était un pulsar. La période de l’orbite est de 8 heures ce qui est très faible au regard des standards astrophysiques. Le fait qu’une des étoiles soit un pulsar fournit une horloge très précise, qui a permis de mesurer la modification de cette période par perte d’énergie sous forme de rayonnement gravitationnel. Le résultat est conforme aux prédictions de la théorie de la Relativité générale  pour la perte d’énergie par rayonnement gravitationnel. Hulse et Taylor ont reçu le prix Nobel en 1993 en récompense de leurs travaux.