Mise à jour le 17 Avril 2018
CONFÉRENCE d’Olivier LAURENT
Thésard en astrophysique au CEA et un Post-doc au Max Planck Institute (Munich)
«ONDES
GRAVITATIONNELLES ET TROUS NOIRS BINAIRES
»
Organisée par la SAF
Dans ses locaux, 3 rue Beethoven, Paris XVI
Le Samedi 14 Avril 2018 à 15H00
à l'occasion de la réunion de la Commission de Cosmologie.
Photos : JPM pour l'ambiance. (Les photos avec plus de résolution peuvent
m'être demandées directement)
Les photos des slides sont de la présentation de l'auteur. Voir les crédits des
autres photos si nécessaire
(Le conférencier a eu la gentillesse de nous donner sa présentation complète (en
pdf) elle est disponible sur le
site de la commission
et également disponible
sur ma liaison ftp
au téléchargement et s’appelle:
Ondes gravitationnelles et trous noirs binaires.pdf
elle est dans le dossier COSMOLOGIE SAF de la saison 2017-2018).
Ceux qui n'ont pas les mots de passe doivent
me contacter avant.
Pour info les actualités cosmo présentées ce jour-là sont aussi disponibles sur
le site de la commission.
(bientôt en ligne)
BREF COMPTE RENDU
Nous avons eu un changement de programme de dernière minute, Philippe Salome qui
devait venir était toujours malade et nous avons cherché quelqu’un pour le
remplacer aussi rapidement.
Notre ami Olivier Laurent qui était intervenu la dernière fois a bien voulu nous
proposer un sujet de remplacement sur les ondes gravitationnelles.
Nous l’en remercions.
Historique des ondes gravitationnelles.
Les ondes gravitationnelles sont une déformation du tissu de l'espace-temps qui
se propage à la vitesse de la lumière.
Elles ont été prédites par Einstein en 1916.
C'est une manifestation de la courbure de l'espace-temps.
Elles sont engendrées par l’accélération de la matière.
Une différence avec les ondes électromagnétiques (radio, lumière, IR etc..) qui
sont des perturbations de ce champ électromagnétique, les ondes
gravitationnelles sont des ondes de l’espace-temps lui-même.
Elles existent bien, cela a été découvert lors de la détection du pulsar binaire
de 1974.
Un pulsar est une étoile à neutrons en rotation rapide et qui émet des signaux
radio analogues à un phare dirigé suivant le champ magnétique. Ce pulsar tourne
autour d'une autre étoile, probablement une autre étoile à neutrons.
Mais l'axe magnétique du pulsar n'est pas aligné sur l'axe de rotation (comme
pour la Terre), ce qui donne des flashes réguliers, d'où le nom de pulsar (pulsating
star).
Parfois, les pulses radio peuvent ne pas être réguliers, il se produit un effet
Doppler lors du mouvement de l'étoile à neutrons sur son orbite, et si sa
vitesse est très rapide, il se produit des effets relativistes.
La période du pulsar de 1974 est de 59ms, mais entachée de +/-2ms de variation
due à la relativité.
On remarque que la précession de ces pulsars (approx 2°/an) est plus forte que
celle détectée pour Mercure (43"/siècle) expliquée par la Relativité Générale
(RG) d'Einstein.
On pense que cela mènera à une coalescence dans 140 millions d’années.
L'explication : le pulsar se déplace dans le champ de gravitation qui varie
suivant la position sur l'orbite.
Cela a valu un Prix Nobel de Physique en 1993 à R. Hulse & J. Taylor
Détection des ondes gravitationnelles sur Terre.
Il existe actuellement quelques détecteurs d'OG sur Terre notamment les projets
suivants :
·
VIRGO franco –italien en Italie (Pise)
·
LIGO américain à Hanford dans l'état
de Washington
De g à d :LIGO Livingston (un bras) ; LIGO Hanford (2 bras) et VIRGO à Pise (2
bras).
La description de l’interféromètre LIGO ou VIRGO a été donnée dans cette
conférence de L Blanchet à la SAF.
Il existe aussi un projet très ambitieux dans l'espace, c'est LISA qui est un
ensemble de trois engins spatiaux très éloignés les uns des autres devant
permettre la détection d'OG. Depuis l’abandon des Américains, c’est devenu le
projet eLISA de l’ESA.
Ce projet est en phase expérimentale et le prototype de faisabilité (LISA
Pathfinder) vient d’être lancé dans l’espace en L1
Tous ces projets sont complémentaires en fait.
Si les projets comme VIRGO et LIGO étudient le domaine des fréquences entre 10Hz
et 10.000Hz, LISA se penche elle sur le domaine des très basses fréquences : un
dix millième à un dixième de Hz.
Ils ne correspondent pas aux mêmes sources astronomiques comme on le voit sur ce
graphe.
Caractéristiques de différents types de détecteurs d’OG suivant les fréquences
détectées. Dans les très basses fréquences les nouveaux
projets EPTA (European Pulsar Timing Array)
et IPTA (International Pulsar Timing Array).
Dans les basses fréquences, c’est au tour de eLISA d’être performante depuis
l’espace. Les autres fréquences sont du domaine de LIGO et VIRO.
Les différentes zones colorées correspondent aux différents objets produisant
des OG.
(Courbes : Christopher Moore, Robert Cole et Christopher Berry)
Comment décrire une onde gravitationnelle ?
Effet du passage des OG.
La
notion de distance est différente de la notion ordinaire ; en Relativité
Générale on préfère la définir comme la mesure du temps aller-retour d’un
signal.
Ici, la distance L vaut : ½
c(t2-t1)
Au passage d’une onde gravitationnelle, la longueur L varie de la quantité « h »
appelée amplitude de l’OG.
DL/L
= h est de l’ordre de 10-21
Quantité si faible qu’elle n’est pas facile à détecter !!
Alors, comment mesurer une telle distance ?
En utilisant la lumière: Heureusement, la lumière a un statut à part : la
vitesse de la lumière est constante localement dans tous les référentiels.
Son trajet le long de sa géodésique est bien perturbé par le passage de l'onde
mais sa vitesse reste insensible à la perturbation.
Cette
déformation des distances peut donc être détectable en mesurant le temps de
parcours de la lumière entre les 2 particules (interféromètres LIGO-VIRGO).
Lors du passage de l’onde, la distance entre les particules se déforme selon une
ellipse pour vibrer selon le grand axe et demi-grand axe.
Il y a donc 2 modes de vibrations appelés :
Polarisation « plus » et « croix ».
Principe du fonctionnement de l’interféromètre LIGO
Lorsqu’une onde gravitationnelle déforme le miroir (2), la lumière du Laser
modifie l’image sur le détecteur et forme des interférences.
Illustration : Le Temps (Suisse)
Une remarque :: La distance entre les miroirs changent physiquement, mais il faut considérer que c'est l'espace qui se dilate entre les miroirs et que les miroirs ne subissent pas d'accélération lors du passage de l'onde (leurs coordonnées comobiles ne changent pas comme pour les galaxies entrainées à l'expansion de l'Univers).
La détection des premières ondes gravitationnelles.
C’était le 11 Février 2016 à 10H30 heure de Washington au National Press
Club de cette ville mais retransmis au même moment au MIT, Caltech et LIGO et
sur Internet : les Ondes Gravitationnelles (OG) ont été mises enfin en évidence.
On savait bien sûr qu’elles existaient, mais on n’avait jamais pu prouver leur
manifestation physique.
C’est en fait le 14 septembre 2015 que les scientifiques de LIGO reçoivent le
signal en provenance de l’autre bout de l’Univers, signal qui est représenté
ci-contre.
De haut en bas :
·
Le signal reçu par Ligo Hanford
·
Le signal reçu par Ligo Livingston à 3000km du précédent
·
La superposition (décalée de 7ms) parfaites des deux signaux
·
© LIGO
Le signal provient d’un coin de l’Univers situé à 1,3 milliards d’années-lumière
(Gal)
Après 5 ans de mise à niveau de LIGO, c’est le couronnement pour toutes les
personnes impliquées dans ce projet.
Les signaux détectés indiqueraient aux chercheurs la taille des deux trous noirs
grâce à l’ondulation de l’espace-temps produit.
LIGO a détecté les ondes lorsque leur fréquence atteignit 35Hz, fréquence qui
allait vite augmenter jusqu’à 250Hz puis disparaitre.
Tout s’était passé en un quart de seconde. Hanford le vit 7ms plus tard,
c’est apparemment le temps de propagation des ondes à travers la Terre.
Cet évènement aurait produit 50 fois plus d’énergie que toutes les étoiles de
l’Univers connu pendant une fraction de seconde !
On notera que le télescope spatial gamma Fermi a détecté 400ms après un sursaut
gamma (GRB) probablement lié à cet évènement
Tout cela mena à l’annonce du 11 Février 2016 suivi de : Observation
of Gravitational Waves from a Binary Black Hole Merger, publication dans
Physical Review Letters, au titre évocateur qui devrait rentrer dans les livres
de physique dans les prochaines années, comme étant la source du prochain prix
Nobel.
Les trous noirs binaires.
Cette première détection dont nous venons de parler concerne la coalescence de
deux trous noirs.
Pour L = 4 km et 280 allers-retours entre les miroirs des cavités Fabry-Perot,
l’interféromètre simule des bras de 1120 km de long. Les interféromètres de LIGO
détectent un déplacement de ±
2.10−18 m, un
millier de fois inférieure à la taille du proton ou 100 millions de fois
inférieur à la taille d’un atome.
Exemple du signal GW150914 observé à LIGO (Hanford)
Deux trous noirs (29 et 36 masses solaires) sont entrés en collision et ont émis
à cette occasion des OG dans l’espace, qui ont été détectés par LIGO. Le
résultat un monstre de 29+36 = 62 masses solaires, mais quoi !, mon addition est
fausse, mais oui, c’est bien sûr, la différence de masse est passée dans
l’énergie des ondes gravitationnelles.
C’est la première fois que l’on « assiste »par ondes interposées, à la fusion de
deux trous noirs.
LIGO a détecté un signal dû à la coalescence de ces deux trous noirs,
aboutissant à la fusion de ceux-ci.
Les TN tournant l’un autour de l’autre, leurs orbites se rétrécissent et le
mouvement s’accélère ; en émettant des ondes gravitationnelles de fréquence de
plus en plus hautes. C’est la spirale infernale jusqu’à la fusion des deux TN.
Le signal détecté a duré 5 secondes et sa puissance correspond à l’énergie de 3
masses solaires.
Au moment où les deux trous noirs ont été détectés, c'est-à-dire lorsque la
fréquence du signal gravitationnel est entrée dans la bande de fréquence des
détecteurs à environ 35 Hz, ils étaient distants l’un de l’autre d'environ 1000
km
Ce qui se passe en simulation lors de la coalescence de deux trous noirs,
à voir absolument, très bien fait.
Cette fusion (merger en anglais) de ces deux trous noirs correspond à 1000
explosions de SN !
Il y a
trois étapes à cette fusion :
·
Phase spiralante (théorie post-newtonienne)
·
Phase de fusion (relativité numérique)
·
Phase de relaxation (théorie des perturbations)
Le signal modulé en fréquence peut être équivalent
à un gazouillis d’oiseaux, un
« chirp » en anglais.
Améliorations des systèmes.
On pourrait avec des systèmes plus performants envisager de détecter les ondes
gravitationnelles dues au Big Bang ; elles jouent sur la polarisation du CMB,
c’est pour cette raison qu’on cherche à la mettre au jour.
On peut voir sur
ces graphiques les améliorations attendues dans le futur.
Notre ami nous montrant la suspension des miroirs à l’aide d’une petite manip !
POUR ALLER PLUS LOIN :
À lire absolument pour tout comprendre :
Les Ondes gravitationnelles par N Deruelle et JP Lasota chez O Jacob
Trous noirs et OG : CR conf SAF (Cosmologie) de N Deruelle du 30 Sept 2017
OG et étoiles à neutrons : CR de la conf IAP de F Daigne du 9 Janvier 2018
Première détection directe des ondes gravitationnelles par Nicolas Arnaud du
LAL et de IN2P3
Il y a du Nobel dans l’air : Les ondes gravitationnelles sont mises en
évidence. (astronews du 11/02/2016)
La détection des ondes gravitationnelles : CR de la conf SAF de Luc Blanchet
(Cosmologie) du 28 Mai 2016
The
Fate of Merging Neutron Stars
Status of the Advanced LIGO and Advanced Virgo detectors
PROCHAINES RÉUNIONS DE LA COMMISSION DE COSMOLOGIE :
Notez dès à présent les dates des prochaines réunions : toujours à 15H au siège
3 rue Beethoven P16
Merci d’avance de votre participation.
AUTRES DATES IMPORTANTES :
Prochaine conférence mensuelle de la SAF : Vendredi
18 Mai 19H
à TelecomParisTech Amphi
Thévenin
Les satellites naturels des planètes. Une variété étonnante.
Par
Jean-Eudes Arlot Astronome Obs de Paris
Entrée libre mais réservation
obligatoire.
À partir du 14 Avril 2018
(En cas de réservation complète, il y aura une liste d’attente)
Journée des Commissions de la SAF: samedi 9 Juin
à l’École des Mines comme l’année dernière,
Marquez ces dates dans vos agendas
Jean Pierre
Martin
SAF Président de la Commission de Cosmologie
Abonnez-vous gratuitement aux astronews
du site en envoyant votre e-mail.