Mise à jour 5 Juillet 2019
CONFÉRENCE de Jean Christophe HAMILTON
APC IN2P3
« EXPLORER L’UNIVERS PRIMORDIAL AVEC QUBIC. »
Organisée par la SAF
Dans ses locaux, 3 rue Beethoven, Paris XVI
Le Samedi 15 Juin 2019 à 15H00
À l'occasion de la réunion de la Commission de Cosmologie
Photos : JPM pour l'ambiance
(les photos avec plus de résolution peuvent
m'être demandées
directement)
Les photos des slides sont de
la présentation de l'auteur. Voir
les crédits des autres photos et des animations.
Le conférencier a eu la
gentillesse de nous donner sa présentation, elle est disponible sur
ma liaison ftp et se nomme :
SAF-Juin-2019-QUBIC-JC-Hamilton.pdf, qui se trouve dans le dossier
COSMOLOGIE-SAF/ saison 2018-2019.
Ceux qui n'ont pas les mots de
passe doivent me
contacter avant.
Pour info les actualités cosmo
présentées ce jour-là sont
aussi disponibles
sur le site de la commission.
Merci à Olivier Laurent pour
une grande partie du texte de ce compte rendu.
Jean Christophe Hamilton est
Dr de recherche au CNRS (IN2P3), il travaille au laboratoire d’Astro Particules
et Cosmologie (APC) de
Paris 7.
Il est responsable de
l’expérience QUBIC dont nous allons parler.
Il donne aussi des cours de
cosmologie moderne à Paris 7, que je vous conseille de consulter absolument.
· Partie
1
· Partie
2
· Partie
3
· Partie
4
L’étude de la polarisation du
fond diffus cosmologique donne accès aux fluctuations de densités produites bien
avant le découplage matière-rayonnement (380.000 ans après le big bang).
Avant la recombinaison, les
photons n'étaient pas en mesure de voyager librement à travers l'univers, car
ils se dispersaient constamment sur les électrons libres.
Cette dispersion entraînait une
perte d'information, et « il y a donc une barrière de photons à un certain
redshift » près de celle de la recombinaison qui nous empêche d'utiliser des
photons directement pour en apprendre davantage sur l'univers lors de décalages
plus importants.
Une fois que la recombinaison
commence, le chemin libre moyen des photons augmente en raison du nombre
inférieur d'électrons libres.
Après la recombinaison, le
libre parcours moyen du photon est devenu plus grand que la longueur de Hubble,
et les photons peuvent voyager librement sans interagir avec la matière.
Pour cette raison, la
recombinaison est étroitement associée à la dernière surface de diffusion, qui
correspond à la dernière fois où les photons du fond diffus cosmologique ont
interagi avec la matière.
Cependant, ces deux événements
sont bien distincts.
|
|
Le découplage
matière-rayonnement se produit vers une température de 3000 K à un
redshift de 1100 (380.000 ans après le big-bang) sur une certaine
épaisseur (delta z = 80 correspondant à environ 50 000 ans) |
Mais la
recombinaison commence vers un redshift de 1500 (220.000 ans après
le big-bang) pour finir vers un redshift de 1000 (vers 430.000 ans
après le big-bang). |
Le rayonnement du fond diffus
cosmologique (CMB) correspond à un rayonnement de corps noir à 3000 K émis
380.000 années après le big bang. Ce rayonnement s’est ensuite refroidi à la
suite de l’expansion de l’Univers et correspond actuellement à une température
de 2.728 K (T = 3000 K / redshift = 1100).
Ce rayonnement a été prédit par
G Gamov en 1948 et découvert par Bob Wilson et Arno Penzias en 1965 (Nobel en
1978).
L’observation du CMB donne dans
un premier temps un dipôle correspondant essentiellement au mouvement de notre
galaxie par rapport au CMB (auquel on doit ajouter le mouvement du système
solaire dans notre galaxie et de la Terre autour du soleil) via l’effet Doppler.
Après soustraction du dipôle,
les fluctuations du CMB de l’ordre de quelques dizaines de microkelvins sont
mesurables.
Les régions rouges
correspondent par convention aux régions les plus chaudes et donc les plus
denses (qui formeront par la suite les grandes structures de l’univers) lors de
l’émission du rayonnement 380.000 ans après le big bang.
La carte du CMB permet de
calculer son spectre de puissance correspondant à la décomposition spectrale via
la transformée de Fourier de la fonction de corrélation à deux points de la
carte de température (liée à la densité de matière).
Le modèle cosmologique permet
d’expliquer plusieurs milliers de points de mesures indépendants avec moins de
10 paramètres.
Les fluctuations en température
de la carte du CMB ont été produites après l’inflation jusqu’au découplage du
rayonnement avec la matière.
Elles résultent, en partant du
spectre primordial (juste après l’inflation), des oscillations acoustiques de la
matière baryonique (matière normale) ainsi que de la géométrie de notre univers.
Le modèle
ΛCDM (Lambda Cold Dark
Matter) est maintenant bien établi et correspond au modèle standard de la
cosmologie.
Il est composé de 3 termes
différents :
•
Le terme Λ (Lambda) décrit la constante cosmologique qui est associée à
l’énergie noire.
•
Le terme CDM (Cold Dark Matter) décrit la matière noire froide. Le terme
« dark » (« sombre ») signifie qu’elle interagit très peu avec la matière
normale. Le terme « cold » (« froid ») signifie qu’elle se déplace à une vitesse
faible par rapport à la vitesse de la lumière.
•
La matière baryonique qui compose la matière visible.
La polarisation du fond diffus
cosmologique permet d’accéder à d’autres informations.
La décomposition de la
polarisation en paramètre de Stokes peut être faite sous la forme de deux
paramètres : mode E
(en référence au champ électrique qui peut avoir une composante divergente et
aussi rotationnelle non nulles) ou
mode B (en
référence au champ magnétique qui ne peut avoir qu’une composante rotationnelle
non nulle).
Les variations de densité dans
le plasma primordial provoquent des motifs de polarisation (diffusion Thomson
dans un plasma hétérogène) en forme d’anneaux ou en étoiles (modes E).
Ces modes E ont été détectés en
2002.
Ces mesures démontrent que la
géométrie de l'Univers
est presque plate (c'est-à-dire presque euclidienne), plutôt que courbée
(qui obéirait donc aux lois de la géométrie riemannienne, par exemple).
Elles permettent de conclure à
l'absence de cordes cosmiques qui se seraient formées lors d'une transition de
phase (résultant d'une brisure spontanée de symétrie) dans l'univers primordial
en tant que composantes majeures de la structure cosmique, et suggèrent que
l'inflation cosmique explique mieux la formation de cette structure.
Par contre, les ondes
gravitationnelles ne peuvent produire que des modes B (tourbillons orientés
gauche ou droite).
Les ondes gravitationnelles
sont compressées lors de leur déplacement dans l’espace.
Cette compression produit un
motif distinct sur le fond diffus cosmologique.
Tout comme les ondes
lumineuses, les ondes gravitationnelles ont également une « chiralité »
(préférence gauche ou droite) et peuvent avoir des polarisations droitières ou
gauchères.
Les perturbations scalaires
correspondent aux oscillations acoustiques de la matière baryonique et ne
produisent pas de polarisation en mode B contrairement aux perturbations
tensorielles.
Les polarisations en mode B
peuvent avoir deux origines cosmologiques :
-
Les ondes gravitationnelles primordiales prédites par les modèles
d’inflations cosmologiques (non encore observées – recherche en cours)
-
Les lentilles gravitationnelles produites sur l’émission du CMB entre
380.000 ans et maintenant (observées en 2013)
Les modes B peuvent être
contaminés par une composante non cosmologique venant des poussières entre les
étoiles de notre galaxie (fausse détection de l’expérience BICEP2 en 2014).
Le rapport entre les modes B
(tensoriel) et E (scalaire) donnés par r est attendu entre 0,01 et 0,1.
Les modes B déjà détectés ne
permettent pas de séparer les effets provenant des lentilles gravitationnelles
et de la poussière interstellaire.
Les modes B sont difficiles à
observer à cause :
·
La sensibilité
nécessaire le signal est de l’ordre de 10nK sur un fond de 3K, cela va
nécessiter des détecteurs particulièrement sensibles.
·
Des avant-plans
astrophysiques, n’oublions pas la fausse alerte de BICEP2
·
Des effets
systématiques qui vont nécessiter une modulation de la polarisation.
L’interférométrie bolométrique permet de combiner la bonne sensibilité des
bolomètres et un bon contrôle des effets systématiques avec les interféromètres.
C’est le but premier du projet
QUBIC, acronyme de QU Bolometric Interferometer for Cosmology, qui doit
déterminer les anisotropies du CMB par méthodes interférométriques utilisant des
bolomètres.
Les détecteurs sont des
bolomètres analogues à des capteurs de température, ils nécessitent un
refroidissement puissant, car c’est aux alentours de 0,1K qu’ils sont le plus
sensibles. (Planck utilise des bolomètres)
QUBIC est une
collaboration internationale de 6 pays et de 22 laboratoires dont des labos
français comme :
APC PARIS, FRANCE
CSNSM ORSAY, FRANCE
C2N SACLAY, FRANCE
IAS ORSAY, FRANCE
IEF ORSAY, FRANCE
IRAP TOULOUSE, FRANCE
LAL ORSAY, FRANCE
L’interférométrie
bolométrique est une nouvelle technologie très prometteuse.
QUBIC devrait combiner les
avantages de l’interférométrie et de l’utilisation de capteurs bolométriques.
Le site d’observation choisi
est l’Argentine.
Situé à 5000m d’altitude et pas
loin de l’Atacama (de l’autre côté de la frontière).
Bonne logistique.
QUBIC opère dans deux gammes de
fréquences : 150 GHz et 220GHz.
Il comporte 2048 bolomètres de
3mmx3mm fabriqués en France à Orsay. Ils sont lus par multiplexage et les
signaux dirigés vers un microprocesseur de leur fabrication.
Les signaux issus des deux
canaux sont envoyés sur des miroirs puis dirigés vers les 400 cornets (horns) de
détection.
On voit le principe ci-contre.
Sur la gauche de la diapo on
voit les franges d’interférences formées.
L’intégration de l’ensemble a
été effectuée en 2018, on voit les détails sur l’illustration à gauche.
1,5m de haut, 1,4m de diamètre
pour une masse de 800kg.
La France est partie prenante
dans ce projet au travers notamment de l’APC, de l’IAS et de l’IRAP.
Le cryostat est italien.
Le détecteur est en cours
d’étalonnage.
Les premiers tests montrent que
l’instrument se comporte comme attendu.
Qubic est un spectro imageur
synthétique, la spectro-imagerie à bandes étroites devraient permettre de
soustraire plus facilement la composante produite par la poussière
interstellaire.
Le réseau de cornets permet
d’avoir une multiplicité des lignes de base pour calibrer l’instrument.
Les émissions venant des
molécules d’eau dans notre atmosphère sont bien en dehors de la bande passante
comme attendu.
Vers fin 2019, la première
lumière de l’instrument devrait avoir lieu et des prises de données s’étalant
sur 2-3 ans pour accéder à une sensibilité sigma(r) = 0,01 qui sera poussée à
0,001.
Voir la présentation pour plus
de détails techniques et photos.
CONCLUSION :
QUBIC est un nouveau concept
d’instrument dédié à l’étude de la polarisation du CMB et à la physique de
l’inflation.
·
Très sensible
avec ses 2048 bolomètres
·
Spectro-imageur
à deux bandes 150 et 220 GHz
·
L’intégration
est terminée
·
Les premiers
résultats attendus en 2019
POUR ALLER PLUS
LOIN :
Exploring the primordial Universe with QUBIC, the Q U Bolometric Interferometer
for Cosmology par JC Hamilton, une présentation (2016) similaire à celle
décrite ici. À
voir.
Exploring the primordial
Universe with QUBIC the Q U Bolometric Interferometer for Cosmology par
JCH (version 2012)
Exploring the primordial
Universe with CMB Polarization (version
2010) (en français)
BIC Technical Design Report,
tous les schémas et courbes
QUBIC: The QU Bolometric
Interferometer for Cosmology sur
arxiv.org
La cosmologie
aujourd’hui par JCH, très bien et très clair. À voir
Le mode B par Futura sciences.
Les tout derniers résultats de Planck : CR de la conf SAF de F. Bouchet le
11 Février 2015
PROCHAINES RÉUNIONS DE LA COMMISSION DE COSMOLOGIE :
Notez dès à présent les dates
des prochaines réunions : toujours à 15H au siège 3 rue Beethoven P16
Merci d’avance de votre
participation.
·
Samedi 12 Octobre
15H : Denis Gialis astrophysicien, sur
« De la Cosmologie standard aux Univers multiples»
Prochaine conférence mensuelle de la SAF au CNAM (Amphi Grégoire) :
Mercredi 11 Sept 2019
19H00
CONFÉRENCE de François FORGET
Astrophysicien, Planétologue, LMD Institut Pierre Simon de Laplace
SUR : « MARS, LE PROCHAIN DÉFI ?»
Réservation à partir du 3 Aout 09H00
Entrée
libre mais
réservation obligatoire.
(Vigipirate)
Bon ciel à tous
Jean Pierre
Martin Président
de la commission de cosmologie de la SAF
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