22
janvier 2006
1 - Vers la
gravitation quantique ?
Voici l'introduction de notre conférencier, Marc
Lachièze-Rey (Directeur de recherche au CNRS, Service Astrophysique du
CEA) :
"Aujourd'hui, notre physique est dominée par deux grands corpus
théoriques : la relativité et la mécanique quantique.
Malheureusement, ils semblent inconciliables, et chacun
nécessite une conception du monde qui s'oppose à celle de
l'autre. Ces problèmes sont particulièrement apparents lors de l'étude de
l'univers primordial, des trous noirs et de la nature du vide.
Les théoriciens cherchent une nouvelle théorie qui harmoniserait
la physique.
Je montrerai les raisons de l'incompatibilité actuelle et exposerai
quelques unes des pistes suivies pour chercher cette nouvelle théorie (gravité
et géométrie quantiques, géométrie non commutative, supercordes), et leurs
implications possibles."
Historiquement, il y a eu plusieurs étapes dans la réflexion d'Albert Einstein : après la Relativité Restreinte (RR) en 1905, il aboutit en 1916 à décrire la gravitation avec la Relativité Générale (RG).
En 1917, Albert ajoute une constante cosmologique à ses équations de champs afin de trouver un modèle d'Univers apparemment stable. C’est le point de départ de la cosmologie relativiste.
L’Univers devient un objet physique constitué par l’ensemble de l’espace-temps indissociable de son contenu de masse et d'énergie, que la Relativité Générale permet de décrire et de mettre en équations.
Les théoriciens ont utilisé diverses géométries à toutes les époques, avec aujourd’hui la notion de "variété" destinée à nommer des objets mathématiques de plus en plus complexes. Chaque théorie se base sur une géométrie particulière : la géométrie euclidienne pour Newton, un espace plat de Minkowski à 3 dimensions d'espace et une de temps pour la RR, la géométrie riemannienne à 4 dimensions munie d'une courbure pour la RG. Aujourd’hui on parle de la géométrie non commutative de Connes.
Du côté quantique, la "théorie quantique des champs" est construite sur l'espace-temps de la RR et permet de décrire les interactions faible et électromagnétique d'une part, forte d'autre part ; nous ne disposons pas à ce jour de synthèse générale satisfaisante de ces deux aspects.
Le problème est que ces théories
font des prédictions très bien vérifiées mais sans principe directeur fort,
sans fondement mathématique fondamental : le modèle standard fait appel à
17 paramètres libres alors que la Relativité Générale n’en utilise que 2
(constantes cosmologique et gravitationnelle).
La théorie quantique des champs donne
des résultats très précis. Il existe donc bien une réalité quantique
incontestable mais elle induit quelques gros problèmes comme celui de la
non localité par exemple (la fonction d'onde est définie partout), alors que la
RG est locale.
En relativité, le temps absolu
n’existe pas et il dépend du repère dans lequel on le mesure, alors qu’en
mécanique quantique il faut un temps. La nature du temps définie différemment
pour des mêmes évènements est en cause
En relativité, l’espace est courbe, en mécanique quantique l’espace est plat. Les forces existent en mécanique quantique, pas en Relativité Générale pour la gravitation.
Il faut donc construire une
théorie où la gravité serait quantique et les premiers essais ont échoué.
L’énergie d’un électron par
exemple est la somme des énergies de tous ses états possibles. Or cette somme
est infinie ! Pour lever les problèmes d’infinis, les théoriciens utilisent la
procédure mathématique dite de "renormalisation".
Malheureusement cette procédure ne peut pas s’appliquer de cette manière la
gravitation, par une "simple" généralisation de la physique quantique
actuelle.
Il faut donc trouver autre chose.
Trois pistes sont actuellement suivies:
·
la théorie des cordes
·
la gravité quantique
·
la géométrie non commutative
Dans la théorie des cordes, les
points sont remplacés par des objets ouverts ou fermés à une dimension (des
cordes), ayant une taille non nulle. La difficulté engendrée par les points qui
induisent des infinis (contournée par la renormalisation) est supprimée.
On s'intéresse aussi à des
sous-espaces de dimensions plus importantes appelés "branes",
avec quelques développements d'une cosmologie branaire.
Parmi les idées récentes figure
la super-symétrie qui permet
d'envisager des "super-cordes". Elle tente d’unifier les descriptions
des interactions fondamentales.et permet de relier par symétrie les fermions et
les bosons (les fermions pouvant être des bosons miroirs et réciproquement) et
donc d’imaginer de nouvelles particules à découvrir. Cette nouvelle approche
qui s'effectue avec des mathématiques complexes dans des espaces à 10 ou 11
dimensions, permet de quantifier toutes les interactions y compris la gravitation.
Le problème est qu'il y a énormément de possibilités et qu'il n'est pas simple de choisir la bonne !
La seconde démarche consiste à
rechercher une quantification de l'espace-temps et de la gravité, donc de
trouver une théorie de la gravité quantique, un peu
indépendamment des autres interactions pour l'instant. Les théoriciens ont
imaginé des représentations en "réseaux de spin" par exemple et
commencent à évoquer des cosmologies quantiques possibles.
Enfin, Alain Connes et son
équipe développent une géométrie
non commutative permettant de considérer l’espace autrement que par un
ensemble de points. L’espace devient discontinu, garde les propriétés de symétrie
et cette approche auto-génère par ailleurs des relations d'incertitude, ce qui
est tout à fait prometteur.
A ce jour, aucun de ces divers
développements n'a reçu de vérification expérimentale.
Les théories de la Relativité
Générale et de la physique quantique décrivent très bien les phénomènes connus,
chacune dans son domaine. Vouloir simultanément
appréhender les deux aspects s'avère être extrêmement complexe.
Par ailleurs la théorie générale
devra bien sûr admettre les descriptions existantes comme de bonnes approximations.
De nouvelles
dimensions, de nouvelles géométries, des cordes, des branes, des super-symétries, des super-particules…..Cela
permettra peut-être de découvrir une nouvelle physique.
Pour
en savoir plus :
allez voir un compte rendu plus détaillé sur le site de JP
Martin:
http://www.planetastronomy.com/special/2006-special/saf-lachieze-cosmo-janv2006.htm
Pour
en savoir beaucoup plus, lisez :
Au delà de
l'espace et du temps,
M. Lachièze-Rey Le Pommier 2004
2 - Actualité de la SAF
ü Trois cours sur le Soleil donnés par J. Moity de l'observatoire de Meudon, se tiendront au siège de la SAF, les jeudis 23 février, 9 et 23 mars 2006, à 18h30.
ü
La SAF participera à la Nuit
des Planètes organisée par l'Observatoire de Paris, du 4 au 7 mars
prochain.
3 -Conférences et séminaires
SAF, Institut
Océanographique, 195 rue St Jacques, Paris 5ème,
Mercredi 25 janvier 2006, à 20h30
"La mission spatiale Corot" par A. Baglin (Observatoire de Paris)
Mercredi 22
février 2006, à 20h30 :
"Les derniers résultats de Deep Impact",
par N. Biver, Observatoire de Paris, SAF)
IAP, 98bis
Bd Arago, Paris 14ème (inscription
préalable obligatoire)
Mardi 7 mars 2006, à 19h30,
"L'espace et le temps dans la physique
d'aujourd'hui" par M. Lachièze-Rey (CEA)
Bureau des Longitudes, Palais de l'Institut, salle Hugot, 23 quai de Conti, Paris 6ème
Mercredi 1er février 2006, à 14 h
"Le système de Saturne révélé par la mission Cassini-Huygens" par C. Sotin (Univ. de Nantes)
Mercredi 1er mars 2006 à 14 h
"Concordia : la nouvelle station scientifique franco-italienne du plateau antarctique" par G. Jugié (IPEV)
CIS, 46 rue Barrault, 75013 Paris
Lundi 20 février 2006, à 19 h 30
"Chasse aux planètes
extraterrestres" par JP. Beaulieu (IAP)
Association
Véga,
24 février 2006, au Château de Plaisir, salle Béjart, rue de la Brétechelle, 78370 Plaisir, à 20h30
"Rendez vous avec un astronome : A.
Dollfus"
Collège
de France
Reprise des cours et
des séminaires de Gabriele Veneziano à partir du 7 février 2006, à 9 h 30
"Interactions fortes et chromodynamique
quantique II : aspects non perturbatifs
4 – Livres et revues
Ont été
évoqués :
ü
Cosmologie Primordiale de P. Peter et JP Uzan (Belin), très
théorique,
ü
Planètes extrasolaires de
F. Casoli et T. Encrenaz (Belin, Pour la Science),
ü
Au plus près de Saturne sous
la direction de P. Morel (Vuibert,
SAF),
ü
La dixième planète, numéro
hors série de Sciences et Avenir, décembre 2005.
5 - Prochaines réunions
18
mars 2006
"Les
équations fondamentales de la cosmologie", par A. Mertz
13
mai 2006
"Les
Télescopes spatiaux", par JP. Martin (Association Véga)
24
juin 2006
A préciser
Sauf avis
contraire, les réunions se tiennent le samedi à 15 heures, au siège de la SAF,
3 rue Beethoven à Paris XVIème.
La formation
des galaxies : état de l'art
Les ondes
gravitationnelles et leurs capteurs
La relativité
d'échelle
Le fond diffus
infra-rouge
Les univers
parallèles (Linde)
Histoire et
philosophie de la cosmologie
Nota : pour des raisons évidentes d'efficacité et
d'économie, il est demandé à chacun de bien vouloir me transmettre une adresse
électronique et de penser à m'informer de son
éventuelle modification.
JP Martin et Claude
Picard