L’attraction gravitationnelle d’un Trou noir est si intense que même la lumière ne peut pas s’en échapper, mais ce n’est pas pour autant que nous ne pouvons pas nous interroger sur ce qui se passe à l’intérieur.
En1930 Subrahmanyan Chandrasekhar montra que la pression de dégénérescence des électrons ne pouvait pas s’opposer à l’effondrement gravitationnel terminal d’une masse d’environ 1,4 fois celle du Soleil. C’était le premier indice que les étoiles ne finissent pas toutes paisiblement en naines blanches, ces astres qui se contractent sous l’effet de leur propre gravité jusqu’à la taille de la Terre et s’éteignent en se refroidissant. Les astrophysiciens sont maintenant quasiment certains, que les étoiles de masse supérieure à plusieurs masses solaires, lorsque les réactions nucléaires cessent faute de munitions, s’effondrent en trous noirs, ces objets dont le champ de gravitation est si intense, que même la lumière ne peut pas s’en échapper.
Que se passe t’il quand l’étoile s’effondre ? Alors que le champ gravitationnel externe s’établit pendant l’effondrement comme une bulle de savon qui enfle, toutes les irrégularités et les caractéristiques distinctives sont soit absorbées, soit rayonnées. Les observateurs à l’extérieur du trou noir voient le champ gravitationnel s’approcher asymptotiquement de la configuration de Kerr-Newman, caractérisée seulement par trois paramètres, la masse, le moment angulaire et la charge. Comme le dit John Wheeler: " le trou noir est glabre". Chandrasekhar les a appelé "Les objets macroscopiques les plus parfaits de l’Univers".
Qu’est ce qui se cache derrière la face glabre et lisse de « l’horizon des évènements” ( la surface du trou) ? Voilà une question que la prudence nous conseillerait de ne pas poser. Comme les trous noirs n’ont droit de cité que depuis peu, le simple fait de poser une telle question, qui semble relever de la plus haute fantaisie, aura vite fait de vous reléguer au rang de demeurés ou parmi les charlatans de tous poils…. Quoiqu’il arrive à l’intérieur du trou, nous n’en saurons jamais rien, et cela n’aura aucune influence sur ce qu’on peut observer. De plus, en 1965 Roger Penrose, alors au Birkbeck College de Londres prouva qu’il devait exister une singularité à l’intérieur du trou, signifiant une rupture avec les lois de la physique. Et pour couronner le tout, les diverses irrégularités capturées pendant l’effondrement sont supposées croître et s’accumuler, générant à l’envi un chaos interne. Au vu de ces arguments, les scientifiques sains d’esprit sont tout de même un peu hésitants à considérer ce sujet d’étude comme sérieux.
En fait les perspectives sont moins sombres qu’il n’y paraît, du fait d’une propriété clé, de l’intérieur du Trou Noir, que nous n’avons pas mentionné. La descente dans un trou noir est fondamentalement une progression dans le temps. A l’intérieur du trou noir, toute forme de matière et toute influence causale sont condamnées à se diriger vers le «centre » (la coordonnée « r » diminue). Le futur est donc irrémédiablement lié à une chute vers l’intérieur, donc la coordonnée spatiale radiale « r » devient de type temps. Ceci signifie que nous ne sommes pas confrontés à un problème structurel, mais à un problème d’évolution. De plus, nous n’avons même pas besoin d’une théorie quantique de la gravitation tant que le rayon de courbure de l’espace-temps ne s’approche pas de l’échelle de Planck (~10- cm). En effet le sens de la flèche de la causalité (de l’extérieur vers l’intérieur) nous protège de notre ignorance des régions les plus internes à courbure élevée, puisqu’elles sont sans effet sur la description des régions qui leur sont externes, qu’on peut alors décrire par les théories actuelles standards et bien établies.
1- Histoire dans l’espace temps de l’effondrement d’une étoile sphérique non chargée. L’axe horizontal est le rayon et l’axe vertical est le temps avancé v : { coordonnée de Eddington Finkelstein, v = t + r*, avec r*= r + 2GM ln [(r/2GM) -1] et c= 1}. Dans cet espace temps un photon qui se dirige radialement vers le trou noir a une ligne horizontale comme trajectoire ( non représentée). Les lignes ondulées sont les photons qui s’éloignent radialement du Trou Noir. Quand l’étoile s’effondre, son attraction gravitationnelle s’accroît, de sorte que même les photons ne peuvent pas s’échapper Les photons émis au moment critique E , sont tout juste piégés. Ils sont captifs de la gravité et ils « matérialisent » l’horizon des évènements, frontière du trou noir. La matière et le rayonnement doivent se propager à l’intérieur des cônes de lumière du futur représentés sur le diagramme (Ils ne peuvent pas aller plus vite que la lumière) et sont condamnés à percuter la singularité centrale à r = 0.
Finalement grâce au théorème “pas de poils” et au travail de Richard Price, les conditions initiales qui vont servir de base à l’évolution sont connues avec précision. Cela contraste sérieusement avec la situation en Cosmologie où la situation initiale est purement spéculative {En Cosmologie, la métrique possède une singularité « temporelle », alors qu’ici elle est « spatiale »}. En 1972 Price, alors au California Institute of Technology, montra que initialement , c’est à dire, près de l’horizon des évènements , le champ gravitationnel à la forme de Kerr-Newman , perturbé par une queue d’ondes gravitationnelles s’amortissant en v, où v est "le temps avancé" et p > 12. Du fait de cet amortissement rapide, cette queue d’ondes gravitationnelles n’a pas d’effets significatifs à l’extérieur, mais à l’intérieur, comme nous allons le voir cet effet est critique.
2 Même diagramme d’effondrement qu’en 1, dans la représentation de Penrose. Les trajectoires radiales des photons sont inclinées à 45(non représenté), et l’infini a été « compacifié » artificiellement par une transformation de coordonnées décrite plus loin dans le texte. Le diagramme de Penrose distord fortement les distances aux points marqués par des cercles avec des croix ( où beaucoup de points à l’infini sont concentrés) et le long des « lignes » joignant ces points. Les courbes à coordonnée « r » constant (l’unité est le rayon de Schwarzschild) sont représentées par des lignes pointillées, à l’extérieur de l’horizon des évènements ces lignes représentent les trajectoires des observateurs “ immobiles”. Les cônes de lumière montrent que sous l’horizon des évènements, la matière et le rayonnement sont condamnés à se diriger vers des “r” toujours plus petits, à l’extérieur de l’horizon des évènements, les cônes de lumière montrent qu’il est toujours possible de s’échapper à l’infini.
L’exploration des niveaux externes d’un trou noir relève alors d’un problème classique d’évolution à partir de conditions initiales, qu il est donc possible d’entreprendre constructivement. La tâche consiste à intégrer les équations différentielles aux dérivées partielles de la théorie d’Einstein par rapport au temps croissants (donc vers l’intérieur du Trou Noir), en partant des conditions initiales de Price sur l’horizon des évènements. Nous insistons sur ce point pour montrer que notre démarche n’a rien de métaphysique ou de désespérément spéculatif. En fait ce n’est pas plus problématique que d’étudier le mouvement d’un fluide, en utilisant les équations hydrodynamiques d’Euler sous l’effet d’une turbulence ou d’un choc initial.
Le trou noir le simple est celui qui résulte de l’effondrement d’une étoile sans moment angulaire et non chargée. Ceci n’exclut pas le fait qu’initialement l’étoile pouvait ne pas être sphérique ( par exemple ellipsoïdale voire cubique !) Cependant pour commencer , intéressons nous à l’effondrement d’une étoile parfaitement sphérique. La figure 1 décrit son histoire dans l’espace temps: L’étoile se contracte jusqu’à atteindre un rayon r = 0, où une singularité est crée qui dure indéfiniment (au sens de la coordonnée de temps avancé v).
L’horizon des évènements qui se forme pendant l’effondrement peut être représenté par une sphère de photons imaginaires, initialement en expansion, mais retenu suspendu ( par la gravité de surface croissante de l’étoile) au rayon de Schwarzschild, 2 G m / c, où m est la masse du trou. Pour un trou noir de six masses solaires le rayon de Schwarzschild est inférieur à 20 km. A plus grande échelle signalons un trou noir de deux milliards de masses solaires, dans le noyau de la galaxie géante M87 – dont la présence a été récemment confirmée par les spectrogrammes pris par le Hubble Space Telescope – qui s’étendrait au-delà le l’orbite de Pluton s’il était à la place du soleil.
Dans l’espace temps décrit sur la figure 1, les photons sortants suivent des trajectoires courbes, alors que la trajectoire d’un observateur immobile ( r = constante) est représentée par une ligne verticale. Dans l’espace courbe de la Relativité générale, il n’existe pas de vraies lignes droites, ce n’est qu’une représentation conventionnelle. Dans la figure 2 nous montrons la même chose mais représentée dans le diagramme de Penrose. Dans lequel les trajectoires des photons sortants et entrants sont représentées par des lignes droites inclinées 45 ( les trajectoires des observateurs stationnaires sont des courbes. Par exemple l’horizon des évènements est maintenant représenté par une ligne droite. On a appliqué une transformation de coordonnées de la forme u=tan v' . Ceci préserve la direction des trajectoires de photons (u=constant), mais compresse la partie u= de l’espace temps sur une ligne à distance finie (u' = /2) sur le diagramme.
Le diagramme de Penrose montre la structure causale de l’espace temps. Les trajectoires de particules matérielles et les signaux de type causal qui se déplacent radialement à une vitesse inférieure à celle de la lumière sont confinées entre les directions nord ouest et nord est du diagramme.
Si l’étoile n’est pas sphérique, une conjecture plausible mais non démontrée « la censure cosmique » stipule qu’un horizon des évènements va quand même se former. Après quelques soubresauts initiaux le champ gravitationnel et la géométrie vont se stabiliser sous une forme sphérique quand v tend vers l’infini. En fait en1980 Igor Novikov et Andrei Doroshkevich, alors à “the Applied Mathematics Institute” à Moscou ont stipulé que cela se produisait à la fois à l’intérieur et à l’extérieur de l’horizon des évènements. Cela résulte en un trou noir de Schwarzschild perturbé par une queue d’ondes gravitationnelles amorties.
Avant d’intégrer la rotation et la charge, signalons au passage que les étoiles et trous noirs chargés électriquement sont de peu d’intérêt pour l’astrophysique. Tout excès de charge doit être rapidement neutralisé par accrétion du plasma interstellaire. Les trous noirs chargés sont intéressants parce qu’ils ont des caractéristiques similaires aux trous noirs en rotation, qui paraissent physiquement plus vraisemblables, et qu’ils pourront donc servir à modéliser ceux-ci, tout en étant plus simples à traiter du fait de leur symétrie sphérique.
L’horizon des évènements est l’ultime endroit où un astronaute qui tomberait dans le trou noir peut donner de ses nouvelles à l’extérieur. Dans l’effondrement tel que décrit jusqu’à présent, l’astronaute peut par contre toujours recevoir des signaux, par exemple il peut toujours voir les étoiles briller dans le ciel nocturne, tout le long du chemin jusqu’à la singularité à r=0. Cependant dès que la moindre charge ou le moindre moment angulaire est introduit, une nouvelle caractéristique, un second horizon interne apparaît, ce qui modifie radicalement les choses. Cet horizon marque le dernier moment où l’astronaute peut recevoir des nouvelles (fig 3).
Le résultat de l’effondrement d’une étoile chargée sphérique est un trou noir de "Reissner-Nordström" . L’étoile en se contractant passe d’abord par l’horizon externe (des évènements) puis par l’horizon interne. A cet endroit sa gravité de surface devient répulsive car une partie importante de l’énergie du champ électrique se trouve maintenant à l’extérieur de l’étoile effondrée et ne contribue plus à sa masse interne effective. Puis l’étoile rebondit à une valeur non nulle du rayon et recommence à s’étendre dans un nouvel univers infini. Elle continue ses pulsations, entrant à chaque fois dans un nouvel Univers.
3 Diagramme de Penrose montrant l’effondrement d’une étoile chargée. L’étoile se contracte à l’intérieur de l’horizon des évènements, puis rebondit et s’étend dans un nouvel Univers. Un astronaute tombant dans le trou noir descend de l’horizon des évènements à l’horizon interne en un temps fini de sa montre, d’une fraction de seconde pour un trou noir de quelques masses solaires à jusqu’à 8 heures pour le trou noir au centre de M87. Pendant cette descente, il peut toujours recevoir des signaux lumineux de l’extérieur, quel que soit l’instant d’envoi, même envoyés très tardivement {voir comment on définit le futur plus loin !!!…}. Il va donc voir tout le futur de notre Univers avant sa propre fin lorsqu’il va se heurter aux énormes densités à l’approche de l’horizon interne.
La possibilité de voyager vers d’autres Univers via un trou noir, semble relever de la science fiction, et avant d’aller plus loin nous devons nous assurer de la stabilité de la configuration. Si la censure cosmique s’applique, l’adjonction d’un moment angulaire ou d’autres conditions non sphériques ne devrait pas autant empêcher l’horizon des évènements de se former et le champ extérieur de converger asymptotiquement vers une situation stationnaire. Les états stationnaires possibles sont ceux de la géométrie de Kerr-Newman à trois paramètres et ont une structure de type treillis comme décrit sur la figure 3.
Mais il y a un os, que Penrose a remarqué le premier en 1968. A la différence des formes d’effondrement les plus simples (décrits sur les figures 1 et 2), la convergence est maintenant non uniforme et n’est plus valide à l’horizon interne. Quelle est la raison de cette instabilité ? Rappelons nous que l’horizon interne est l’ultime endroit où l’astronaute peut encore recevoir des informations, mais lorsqu’il atteint l’horizon, il a reçu toutes les informations envoyées. Dans les quelques instants qui précèdent la traverse de l’horizon, toute l’histoire de l’Univers extérieur défile sous ses yeux, en accéléré. Cette compression, ce décalage vers le bleu, a des conséquences considérables. Qu’une jeune fille s’évente délicatement avec un éventail, si cela dure suffisamment longtemps, cela va provoquer près de l’horizon interne, des ondes gravitationnelles qui vont avoir l’effet dévastateur d’un marteau pneumatique sur le malheureux astronaute.
En pratique, de telles perturbations dépendant du temps sont inévitables. La queue d’ondes gravitationnelles due à l’effondrement non sphérique est partiellement absorbée par le trou noir. De plus la loi naturelle de décroissance en puissance du rayonnement gravitationnel prédite par Price est complètement submergée, près de l’horizon, par le décalage vers le bleu du rayonnement qui croit en exp(2v), où est la « gravité de surface » de l’horizon interne.
Si notre infortuné astronaute est suffisamment chanceux pour survivre au passage à travers ce « rideau » de rayonnement décalé vers le bleu au voisinage de l’horizon interne, la figure 3 suggère qu’il va déboucher sur une région d’espace marquée par une perte de prédictibilité. La valeur d’un champ physique n’est plus maintenant uniquement déterminée par les conditions initiales au moment de l’effondrement (la surface dans la figure 3), du fait de l’influence imprédictible de la singularité à r = 0, où la physique connue jette l’éponge. On appelle cet horizon " Horizon de Cauchy " du nom du problème de Cauchy, sur les conditions initiales en physique mathématique. Cependant nous n’avons aucune raison de supposer que le noyau d’un trou noir réel soit quelque chose qui ressemble au treillis de Kerr-Newman ou de Reissner-Nordström décrits en figure 3.
Cette hypothèse d’un horizon de Cauchy instable, qui devient singulier sous l’effet des queues de rayonnement, a été établi par des intégrations “numériques” par Penrose et Michael Simpson à Birkbeck in 1973, et par plusieurs études analytiques dans la décennie qui a suivi. Cependant ces travaux préliminaires supposent un contexte fixe (Reissner-Nordström) et n’essaient pas d’estimer les effets du rayonnement décalé vers le bleu sur le champ gravitationnel.
Les premières tentatives pour prendre en compte cette « contre réaction » ont été faites par William Hiscock ( University of Montana) en 1981. Des modèles plus représentatifs ont été examinés par Eric Poisson et un des auteurs de ce texte (WI) (University of Alberta) en 1999,et par Amos Ori, alors au CalTech, en 1991.
Dans une première approche, afin de ne pas se heurter à une trop grande complexité mathématique, les premiers modèles comportaient plusieurs approximations. On supposa que les trous noirs en rotation (non sphériques) pouvaient être convenablement modélisés par des trous noirs sphériques chargés, du fait des similarités de leurs structures d’horizons. Les queues d’ondes gravitationnelles quadripolaires furent modélisées par des ondes scalaires sphériques. Des études plus générales par Ori, par Patrick Brady, Chris Chambers et John Smith ( University of Newcastle-upon-Tyne- UK ), et par notre groupe (University of Alberta), confirmèrent que ces modèles simplifiés rendent compte des caractéristiques essentielles du cas générique.
L’effet le plus spectaculaire est ce qu’on appelle « l’inflation de masse ». Le flux entrant dû aux queues d’ondes gravitationnelles, décalé vers le bleu, provoque une croissance exponentielle de la fonction locale de masse à l’approche de l’horizon de Cauchy ( figure 4). La fonction de masse m(u,v), est la masse à l’intérieur {d’une sphère ?}d’un rayon donné. Plus explicitement , m(u,v) C v exp([u+v]), où C est une constante et « u » est un temps interne retardé qui s’accroît à partir de l’horizon des évènements ( où il vaut - ), quand nous nous dirigeons vers l’intérieur. (La masse localisée n’est pas très bien définie en Relativité Générale et il vaudrait mieux parler de l’explosion de courbure conforme locale ~ m/r.)
Nous nous empressons de rassurer le lecteur, aucune trace de cette inflation ne peut être détectée à l’extérieur. L’information liée à cette variation spectaculaire voyage à la vitesse de la lumière ( ainsi que les ondes gravitationnelles) et ne peuvent évidemment pas s’échapper du trou noir. Donc de l’extérieur les observateurs mesurent une masse qui n’est pas plus grande que celle de l’étoile qui a donné naissance au trou noir.
La singularité à l’horizon de Cauchy produite par l’inflation de masse est colossale, mais en fait elle se répartit sur toute la surface de l’horizon de Cauchy. Bien que les objets en chute libre soient soumis à des forces de marée infinies à l’horizon de Cauchy, ces forces ne croissent pas suffisamment vite pour déformer les objets de façon significative avant qu’ils atteignent l’horizon.
m’con
= mcon (1 - 2 G m /c
r )
m' = m (1 - 2 G mcon /c
r ).
La masse et l’énergie totale sont bien sûr conservées. Si le croisement se fait juste à l’extérieur de l’horizon, la masse entrante peut devenir arbitrairement grande. L’énergie totale (cinétique plus potentielle) m' c est alors négative, ce qui signifie que la coquille qui s’étend est piégée dans le trou noir. Ce modèle simple illustre schématiquement mais de façon réaliste ce qui se passe près de l’horizon de Cauchy où les deux coquilles représentent les flux entrant et le flux sortant résultant d’une rétro-diffusion du rayonnement.
L’inflation de masse n’est pas qu’une accroche pour quelque chose de purement formel. Si la lumière entrante était absorbée par un morceau de charbon au centre, sa contribution à l’augmentation de masse énergie du morceau serait bien la valeur inflationniste de sa masse.
Notre message est que l’intérieur d’un trou noir générique n’est pas complètement inconnaissable: les investigations que nous avons décrites conduisent à une représentation utilisable pour au moins les niveaux classiques extérieurs du trou noir.
4 Inflation de masse près de l’horizon de Cauchy. Ceci montre comment (-2 G m / c r), représenté verticalement tend rapidement vers zéro (et en conséquence m -> ) à l’horizon de Cauchy . D’après des calculs numériques de Brady et Smith (Newcastle University).
La figure générique n’est pas si différente de la figure la plus simple dont nous sommes parti. La nouvelle caractéristique frappante est l’apparition d’une singularité localement « modérée » avant la singularité forte centrale. Elle se situe à l’horizon de Cauchy qui est un cylindre 3 D à l’intérieur du trou noir. Il s’étend infiniment vers le passé et se contracte vers le futur, pour finalement percuter la singularité qui apparaît, à ses points terminaux du futur représentés par C dans la figure 5. En effet l’horizon de Cauchy sert de pont , reliant la quiétude de la phase terminale asymptotiquement « sans poils » du trou noir ( aux temps avancés les plus tardifs) à l’effondrement qui présente de grandes turbulences près de C associées à sa formation.
5 L’intérieur d’un trou noir représenté en supprimant une variable angulaire. A l’intérieur du trou, la direction du temps croissant correspond à la décroissance de r. Le rayonnement absorbé par le trou est partiellement diffusé par une « crête » de la courbure à mi chemin entre les deux horizons. La partie non diffusée est alors fortement décalée vers le bleu et s’accumule près de l’horizon de Cauchy. Le rayonnement diffusé provoque une contraction de l’horizon de Cauchy, catalysant en conséquence la conversion inflationniste de l’énergie potentielle en énergie matérielle.
Les objets tombant dans le trou à des temps avancés de plus en plus tardifs (v) tombent vers l’horizon de Cauchy à des temps internes retardés de plus en plus tôt (u). Qu’arrive t’il à ces objets quand ils atteignent l’horizon de Cauchy?
La réponse ne peut être que spéculative. Nos modèles classiques jettent l’éponge juste avant d’atteindre l’horizon de Cauchy, car la courbure de l’espace temps commence à flirter avec l’échelle de Planck, et une théorie de la gravitation quantique est nécessaire. A ce point, nous avons cartographié la côte, mais nous ne savons pas si derrière se tient un continent ou une mince bande de Terre. La réponse la plus prudente est que la question est mal posée, car pour un trou noir « physique » l’horizon de Cauchy ne se forme jamais. Sa formation est contrariée soit par évaporation du trou ou par fusion avec d’autres trous dans un grand écrabouillage cosmique. (cosmological big crunch).
Donc, le sort des objets qui sont brutalement catapultés de la proximité de l’horizon Cauchy dans un futur lointain est lié au destin de l’univers lui même.
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